Florence Parly, ministre de la défense, pourrait-elle faire respecter la loi?
Je crois bien que tout le monde s’en moque, et c’est là le problème. Voici l’histoire.
La démocratie organise la défense de la Nation. Pour cela, elle confie la puissance du feu et le droit à la destruction à l’institution militaire. En retour, elle impose aux membres de cette institution un strict devoir de réserve. Un soldat, s’il est libre de ses opinions et de l’expression de celles ci dans un cercle personnel, ne peut pas participer à une aventure politique visant à la conquête, même pacifique, du pouvoir.
Cette notion est importante. Dans un système monarchique ou dans une dictature, l’armée est au service du pouvoir. Dans une démocratie, qui prend chez nous la forme républicaine, elle est au service de la Nation. La réserve de ses membres est donc essentielle. Elle ne peut souffrir d’aucune exception. En accepter une seule, c’est remettre en cause un principe fondamental de notre organisation politique.
Sous cet angle simple à comprendre, et facile à partager pour tous les défenseurs de la République, il faut signaler le caractère problématique de la campagne électorale d’Eric Zemmour pour la prochaine élection présidentielle. Le candidat à la magistrature suprême, potentiel chef des armées en cas de victoire au printemps prochain, vient de confier la direction de son équipe à un général de 63 ans, Bertrand de La Chesnais, 63 ans, ancien numéro deux de l’armée de terre.
S’il était en retraite, l’engagement de ce général à ce poste là ne poserait aucun problème. La fin de sa participation à l’institution militaire l’aurait libéré de tout devoir de réserve. L’ancien officier deviendrait un citoyen à part entière, libre de s’engager dans le projet politique de son choix. Mais la situation de Bertrand de La Chesnais n’est pas celle d’un retraité. S’il n’est plus un militaire d’active - il a quitté l’armée de terre en décembre 2017 - il appartient aujourd’hui à la 2ème section de l’armée française, dénomination qui ne signifie rien pour le grand public et qu’il convient donc de préciser.
A l’issue de son temps professionnel, un officier français possède un choix qu’aucun autre militaire en Europe ne connaît. Il peut soit se retirer définitivement, soit intégrer jusqu’à ses 68 ans un corps particulier, la 2ème section, qui le place dans une situation intermédiaire vis-à-vis de son institution professionnelle. Créée en 1839 sous l’autorité du roi Louis-Philippe, cette section constitue une réserve dans laquelle le pouvoir puise en cas de besoin.
Ce qui pouvait se comprendre aux temps où le sort de la guerre reposait sur le nombre des individus qu’une Nation était capable d’armer, n’a plus de sens aujourd’hui. D’ailleurs, depuis trente ans, l’hypothèse de la suppression de la 2ème section est régulièrement envisagée. Mais le lobby des militaires est trop puissant pour que le pouvoir politique s’autorise cette action. Donc, tout reste en l’état, même si le concept est obsolète.
Pourquoi les hauts gradés tiennent-ils à cette classification? Probablement, parce que le cordon qui les relie à l’institution est difficile à couper. L’illusion de servir encore permet de supporter la situation de ne plus le faire. Très accessoirement, figurer dans cette vieillerie de 2ème section autorise le port de l’uniforme, permet des dégrèvements fiscaux, justifie l’obtention de billets de trains à prix réduits. Un peu ridicule? Oui. Mais la vie est tissée de mille choses ridicules. Et puis demeure l’espoir, qui se concrétise parfois, d’être rappelé par le ministère de la défense pour une mission, une expertise, un encadrement. Et c’est ici que se noue le problème.
La possibilité de pouvoir encore participer, comme militaire, à la vie de la Nation, justifie l’application d’un strict devoir de réserve à l’encontre de l’officier potentiellement disponible. Il ne peut d’aucune manière entrer dans la polémique politique et influer sur les débats de la démocratie. Son seul rapport admissible à la Nation est son dévouement pour sa défense. Tout le reste est inenvisageable.
Dans ce contexte, la situation de Bertrand de La Chesnais est simple. S’il veut conserver son lien avec l’institution militaire, il doit abandonner la direction de la campagne électorale qu’il a acceptée. S’il veut au contraire mettre ses talents d’organisateur au service d’Eric Zemmour, il doit quitter la 2ème section pour devenir un retraité de l’armée.
Il est peu probable que le général La Chesnais tranche tout seul cette situation malsaine. Avoir le beurre et conserver l’argent du beurre s’inscrit dans la longue liste des faiblesses humaines. En revanche, la ministre de la défense, Florence Parly, ne peut rester inerte. Accepter cette situation, c’est dégrader l’armée, la salir en acceptant que l’un de siens participe au combat électoral. Accepter cette situation, c’est écorner le respect que les citoyens accordent à l’institution militaire qui n’est ni de droite, ni de gauche, mais qui défend au delà de toute attache partisane la République et la Nation.
Ne rien faire, madame la ministre serait une faute. Et ce qui doit être fait n’a rien d’extravagant. Il s’agit d’appliquer la loi, parce que la loi a un sens, et parce que le pacte démocratique repose sur le respect de la loi.
Autre disposition obsolète du code de la défense dans ce registre: l'art. R. 4138-34 qui permet à un militaire d'être placé en position de détachement lorsqu'il exerce une fonction parlementaire ou gouvernementale.
RépondreSupprimerL'actuelle vice-présidente de l'Assemblée Nationale, Mme Laetitia Saint-Paul est une officier de l'armée de terre d'active, actuellement en détachement à l'Assemblée! Elle a même été promue commandant sous sa mandature. Cette situation est à mes yeux bien plus choquante sur le devoir de réserve/ la notion d'armée de la Nation qu'un officier en 2S, d'autant plus que les fonctionnaires se lançant en politique ne bénéficient plus de ce statut désormais et doivent se placer en disponibilité.
Votre jalousie malsaine et votre acharnement envers Eric Zemmour correspondent parfaitement à l'image et la réputation détestables que vous avez dans le public, et que vous partagez avec bon nombre de vos confrères aussi inféodés que vous à la doxa dominante (plus pour longtemps on l'espère).
RépondreSupprimerJe conseille à vos lecteurs de consulter la réponse que vous ont faite les militaires et que partagent la majorité des militaires, qu'ils soient d'active, de la deuxième section ou en retraite comme moi.
Tu devrais plutôt essayer d'attaquer Zemmour sur le fond si tu veux pouvoir l'empêcher de gagner
RépondreSupprimerDébats avec lui à la TV je suis sûr qu'il accepterait